accès, économie numérique, contenu, télévision, technologie

Découvrabilité volet 2

Pour la suite du rapport Découvrabilité fabriqué pour le Fonds des médias du Canada (avec l’ONF, Téléfilm et l’OTM), cliquer ici.

L’objectif de ce deuxième volet est d’explorer la découvrabilité du point de vue des auditoires canadiens : comment ceux-ci apprennent l’existence de contenu, comment ils font leurs choix et quels sont les principaux vecteurs de découvrabilité.

L’Observateur des technologies médias a ajouté des questions portant sur la découvrabilité à son sondage du printemps 2016, et le rapport en rend compte dans la dernière section. Les résultats de ce sondage confirment certaines hypothèses évoquées dans le premier volet, en particulier l’importance des recommandations d’amis, mais une analyse plus approfondie laisse entrevoir un environnement où ces comportements humains pourraient être harnachés par la technologie.

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Brève histoire du financement des productions médiatiques au Canada

Le 2 décembre dernier j’ai fait une présentation dans le cadre des Rendez-vous d’affaires du numérique organisés par le Regroupement des producteurs multimédia (RPM) autour du thème FINANCEMENT ET MODÈLES INNOVANTS: SOMMES-NOUS PRÊTS POUR LES NOUVEAUX DÉFIS?

Nous étant les producteurs multimédia bien entendu.

Le titre de ma présentation était, pour faire court :  Perspectives d’avenir des contributions du secteur privé au financement des contenus : les changements proposés par le CRTC à ses politiques relatives aux Fonds de production indépendants certifiés et quelques autres formes de réglementation et mesures fiscales.

En fait, je me suis aperçu, mais après la publication du programme, que j’aurais faire plus simple et l’appeler : Perspectives d’avenir des partenariats créés par les politiques publiques.

Voici le texte de ma présentation:

Le terme « partenariats créés par les politiques publiques » est du CRTC qui l’utilise pour parler des mesures mises en place pour s’assurer que tous les éléments du système de radiodiffusion contribuent au financement de la programmation. Ces partenariats, c’est l’obligation pour les entreprises de distribution de radiodiffusion, EDR dans le jargon du Conseil, de verser 5% de leurs recettes annuelles brutes à des fonds de production.

Je vais donc vous parler de la consultation lancée par le CRTC fin octobre au sujet de ses politiques relatives aux Fonds de production indépendants certifiés.

Pour mettre cette consultation en contexte, je vais d’abord présenter brièvement l’histoire du financement institutionnel pour la production audiovisuelle au Canada. Et en conclusion, un rappel de quelques hypothèses de financement – d’autres « partenariat public/privé » – qui ont été évoquées ces dernières années, comme par exemple la fameuse taxe Netflix.

Les fonds indépendants certifiés – un peu d’histoire

Pourquoi ces fonds existent-ils ?

Il faut revenir à 1983, quand le gouvernement fédéral a créé le Fonds de développement de la production d’émissions canadiennes de télévision qui était financé par le gouvernement et administré par Téléfilm.

Dix ans plus tard, le CRTC créée Le Fonds de production des câblodistributeurs, à la suite d’une audience portant sur la structure de l’industrie, qui se sentait menacée par l’arrivée des satellites de radiodiffusion directe américains : les « étoiles de la mort » … qui auraient pu – si le CRTC n’était pas intervenu, diffuser au-delà de 500 chaînes de télévision étrangères. (C’était l’époque où on venait de découvrir la compression vidéonumérique qui permettait de loger plusieurs chaînes sur un même transpondeur de satellite.)

Les câblodistributeurs ont alors proposé de contribuer au financement de la programmation en échange du maintien d’une majoration tarifaire temporaire approuvée quelques années auparavant : ils verseraient la moitié des revenus à un nouveau Fonds de production des câblodistributeurs (et ils étaient autorisés à conserver l’autre moitié des revenus).

Ce partenariat est devenu une condition de licence pour toutes les entreprises de distribution de radiodiffusion (y compris les nouveaux satellites de radiodiffusion directe canadiens – les américains ont été repoussés à la frontière) : les EDR doivent contribuer 5 % de leurs recettes annuelles brutes à un fonds de production indépendant pour la création d’émissions canadiennes.

Par la suite ce Fonds a été fusionné avec le Fonds de développement de la production d’émissions canadiennes de télévision (FDPECT) et leur rejeton s’est d’abord appelé le Fonds de télévision et de câblodistribution pour la production d’émissions canadiennes (le FTCPEC) – puis il est devenu le Fonds canadien de télévision en 1998.

En 1997, le Conseil décidait qu’au moins 80 % de la contribution des EDR devait aller au Fonds de développement de la production d’émissions canadiennes de télévision et que le 20% restant pouvait être un ou plusieurs fonds administrés par un organisme indépendant, existants ou nouveaux.

Fin des années 90, les nouveaux médias débarquent sur ce qu’on appelait alors l’autoroute de l’information, ou encore l’inforoute. Le gouvernement fédéral crée le Fonds pour le multimédia (administré par Téléfilm) en 1998, qui deviendra le Fonds des nouveaux médias du Canada en 2001.

Puis, le FCT est fusionné avec le Fonds des nouveaux médias et devient le Fonds des médias canadiens (FMC), financé par le gouvernement fédéral et les contributions des EDR.

En 2010, le CRTC modifie les critères d’admissibilité à l’égard des fonds de production indépendants pour qu’ils puissent servir à des projets néomédiatiques et au développement d’émissions (pilotes).

Afin de veiller à ce que le financement de projets néomédiatiques autonomes ne nuise pas indûment au financement de productions télévisuelles, le Conseil établit à 10 % par année la contribution maximale des EDR pouvant être versée à un ou plusieurs fonds de production indépendants.

Avis de consultation sur les politiques relatives aux fonds de production indépendants certifiés

En mars de cette année, le CRTC a annoncé une première partie des changements à venir à la suite de la consultation Parlons Télé.

Parmi ceux qui ont fait la manchette, il y a eu la réduction des quotas d’émissions canadiennes,  l’élimination de la politique d’exclusivité des genres et les changements aux forfaits des télédistributeurs.

Mais certaines observations du CRTC – à mon avis, un peu passées inaperçues – portaient sur les faiblesses du secteur de la production indépendante.

Le Conseil a écrit, par exemple, que le système de financement actuel ne favorise pas la capitalisation du secteur de production canadien, qui est trop dépendant du financement public.

Son diagnostic :

  • Les producteurs indépendants sont incités à exploiter leur affaire comme un service de l’industrie qui fonctionne de projet en projet ;
  • Les services de programmation acquièrent du contenu à la pièce, sans vraiment tenir compte du développement d’émissions à long terme ;
  • Les deux parties s’appuient fortement sur les subventions ou investissements gouvernementaux pour assurer leur viabilité.

D’après des données extraites du rapport annuel du FMC, et rapportées dans la décision du CRTC, voici le portrait du marché francophone en 2014 :
graphique blogue

Les financements institutionnels, ceux émanant des « partenariats créés par les politiques publiques », représentaient 55% du financement des émissions canadiennes. Les radiodiffuseurs sont les deuxièmes investisseurs avec 42%. Les producteurs avaient investi 2% de leur propre argent dans leurs productions.

Du côté du marché anglophone les producteurs avaient investi 4%, les radiodiffuseurs 29% en licences et les autres sources – des sources étrangères en grande partie – représentaient 13% du financement.

Dans sa Politique réglementaire de radiodiffusion CRTC 2015-86, donc, le CRTC a indiqué qu’il allait examiner ses politiques sur les FPIC « afin de s’assurer qu’elles accordent une plus grande souplesse en matière de financement de la programmation canadienne ».

L’objectif est de s’assurer que les FPIC contribuent « davantage à un secteur de production canadien plus robuste et bien capitalisé, mieux en mesure d’exploiter à long terme les occasions de revenus et de s’associer à des radiodiffuseurs ».

Bref, que ce secteur soit en mesure de réinvestir ses profits dans la production.

La consultation porte sur la façon dont ces fonds peuvent contribuer au système de télévision de l’avenir et aborde des questions comme la gouvernance et les exigences de rapport.

On se rappellera qu’actuellement les fonds sont certifiés par le CRTC si les projets médiatiques numériques choisis :

  • Ont conclu une entente de développement avec une entreprise de radiodiffusion autorisée ou sont liés à une production elle-même admissible à un financement ;
  • Si le fonds accepte des projets médiatiques numériques non liés à une émission de télévision, un maximum de 10% du fonds est consacré à leur financement.

Donc, si je calcule bien il y aurait tout au plus 6 millions $ par année qui peuvent revenir à des projets médiatiques numériques autonomes, non liés à des émissions de télévision, puisque les FPIC génèrent un financement d’environ 60 millions $ par année.

Parmi les questions de la consultation sur lesquelles le mémoire du RPM va particulièrement se pencher, il y a celles-ci qui figurent dans le bloc de questions portant sur les contributions des FPIC à un « système de télévision souple et tourné vers l’avenir » :

Q6. Quelles mesures incitatives le Conseil pourrait-il adopter en vue d’augmenter et de promouvoir la création de productions en ligne ? Quels obstacles liés au financement de productions en ligne, s’il en est, devraient être supprimés, et pourquoi ?

Q.7 Quelle serait l’incidence sur l’ensemble de la création de contenu canadien de la suppression de l’exigence selon laquelle un producteur doit avoir conclu une entente sur les droits de diffusion ? Par exemple, cela permettrait-il la création d’un plus grand nombre de productions en ligne ?

Et celles-ci, portant sur les critères de certification des fonds

Q.12 Quelle modification, s’il en est, devrait-on apporter aux sommes qui peuvent être allouées à des projets médiatiques numériques non liés à des émissions de télévision ? Est-il même nécessaire de limiter le financement de ces types de productions ?

Q.14 La définition de « projet médiatique numérique » devrait-elle être modifiée ? Quelles autres formes de production devraient être admissibles à recevoir du financement en vertu de ce critère ?

Les membres du panel – qui connaissent les rouages du financement de la production audiovisuelle au Canada beaucoup mieux que moi et qui doivent quotidiennement arbitrer entre les divers intérêts en présence dans l’industrie : producteurs télé, radiodiffuseurs, producteurs numériques, organismes gouvernementaux –  auront sûrement des éléments intéressants à apporter à ces questions.

Pour ma part, je trouve que la formulation des questions du Conseil indique qu’on commence à considérer les productions médiatiques numériques non plus comme un complément aux émissions de télévision, mais comme des éléments à part entière du système qui peuvent contribuer à améliorer sa robustesse du système.

Autres formes de partenariats créés par les politiques publiques

On discute depuis quelques années de la contribution des nouveaux acteurs de l’écosystème numérique au financement de contenus. En France en particulier, où on a une longue habitude d’utiliser les mesures fiscales pour financer la création, on l’explique ainsi dans le rapport « Contribution aux politiques culturelles à l’ère numérique » de Pierre Lescure, qui date de 2013, on indique que :

Il paraîtrait légitime (…) d’ériger en principe général la règle selon laquelle tout acteur économique tirant un bénéfice de la circulation des œuvres doit contribuer à leur financement.

C’est en vertu de ce principe que les créateurs revendiquent régulièrement des mesures qui forceraient les « acteurs économiques » à contribuer au financement de leur création.

 

Taxer les FSI (fournisseurs de services internet)

C’est une question qui a été mise de l’avant en 2009, au moment d’une autre consultation du CRTC portant celle-là sur la radiodiffusion par les nouveaux médias. C’est le CRTC lui-même qui avait conclu qu’une telle taxe était réclamée par la majorité des intervenants pour aider à financer la production d’émissions de télévision et que cela échappait à sa juridiction de l’imposer. Il avait renvoyé la question aux tribunaux, beaucoup, à mon avis, pour souligner que la Loi sur la radiodiffusion était obsolète et qu’il était temps de la réviser.

Ça s’est rendu en cour suprême et la conclusion a été que les FSI n’exploitent pas des « entreprises de radiodiffusion » assujetties à la Loi sur la radiodiffusion lorsqu’ils fournissent l’accès par Internet à la radiodiffusion puisqu’ils ne participent pas à la sélection et à la création de contenu et à sa mise à disposition sous forme de forfaits.

Conclusion : il faut changer la Loi.

Pour finir, ailleurs le monde :

En France on a imposé depuis 2008, une taxe pour tous les distributeurs de contenu audiovisuel, les éditeurs de services de télévision quel que soit leur réseau de diffusion d’une part, et les distributeurs de services de télévision quel que soit le réseau de communications électroniques utilisé d’autre part. Cette taxe est administrée et récoltée par le CNC (Centre national du cinéma et de l’image animée) dont la mission est de soutenir l’économie du cinéma, de l’audiovisuel et du multimédia.

Ailleurs dans le monde, on commence à imposer des taxes appelées « Google » ou encore « Netflix », en Angleterre, en Australie par exemple, qui visent à récupérer les taxes que ces entreprises réussissent à éviter grâce à leur grande maitrise de « l’optimisation fiscale », une façon plus diplomatique de désigner l’évitement fiscal.

Voilà, c’était un bref survol des formes de partenariats qui peuvent être créés par les politiques publiques pour financer le contenu.

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Les tout-numériques: la conclusion

Pour le rapport « Le consommateur de médias exclusivement numériques », j’avais rédigé une conclusion qui a été un peu amputée pour la publication, pour cause « d’éditorialisation ». Un peu de nébulosité aussi. C’est vrai, mais je l’aimais bien quand même. La voici, dans sa version originale anglaise:

In 1913, Wolfgang Riepl, a German journalist and newspaper editor, formulated a hypothesis about media that he called « a fundamental law of the development of communication systems“[1].

Riepl’s law, as it is known today, posits that new types of media never replace the existing modes of media and their usage patterns. Instead, a convergence takes place in their field, providing different application for these older forms.

This hypothesis is being used again today, especially by traditional media executives, and their argument goes like this: so far, no new medium has killed an old one. The radio did not eliminate recorded music, TV didn’t eliminate radio or movies, online interactive media didn’t eliminate radio, television or film.

Indeed, traditional means of consuming media are still dominating the Canadian media landscape and will for a long time still. 85 percent of Canadian households are still subscribing to a broadcasting distribution service; over-the-air radio yearly revenue keeps growing despite the success of streaming services like Spotify; Canadians bought almost 18 million CDs in 2014, which is 60 percent of total albums sold (although down from the peak in 2001.)

But these numbers are potentially misleading. Cable subscriptions have been decreasing for the last two years, commercial radio revenues are growing more modestly than in the past, recorded music sales, in any format, have collapsed, some say that print media are doomed…

Yet, what our conversations with the panellists reveal is that some consumers are not simply abandoning traditional platforms and turning towards digital content, they actually seem to know no other way to consume content but on digital platforms. For them, a change in media consumption would actually be to watch cable television, listen to FM radio or read a printed newspaper or magazine. Digital-onlys may represent a new species of consumers that view their media habits as completely normal and organic. Indeed, some are not even aware they belong to this digital group.

In the same way that mass communication was born with the printing press, the internet is bringing about more than a simple disruption of the traditional media business models. Jeff Jarvis, journalism professor and author, puts it this way in his 2011 book “Public Parts”: “The changes brought on by the internet today appear huge in the mirror, but we are still early in this revolution.”

The participants of our focus groups told us how important it was for them to be able to access content without intermediaries telling them what, when and how they could access it. This sentiment was the foundation of their “digital-only” lifestyle.

Alexis Madrigal, contributing editor for The Atlantic, has an interesting explanation for this: “We’re creating a world that seamlessly, effortlessly shapes itself to human desire. It’s no longer cutting through a mountain to prove we dominate nature; now, it’s satisfying each impulse in the physical world with the ease and speed of digital tools. The shortest way to explain what Uber means: hit a button and something happens in the world (that makes life easier for you).”

Whereas, for past generations consuming media meant sitting in front of a screen and waiting passively for content to be pushed to them, or holding pieces of paper and deciphering the meaning of the letters printed on it, today’s digital-onlys cannot imagine a world where they wouldn’t have access to the button that makes something happen in the world.

This study only paints a preliminary portrait of this group, but it demonstrates that there is still much to learn from them. Since these viewing habits can serve as a leading indicator of the future of media consumption, further analysis would provide valuable insight on how to adapt to the changing media landscape.

Furthermore, it would be interesting, while doing this analysis, to consider changing media consumption habits across generations. Measuring the population of over-25 migrants who have already embraced digital media as their primary source for content could bring about some surprising discoveries.

Television opened the world to past generations, but a world controlled, among other things, by regulation and copyright laws. Nowadays, the “button that makes something happen in the world” is shaping the global media environment. In a publication from its ConsumerLab, telecommunication giant Ericsson tells us that “All around the world, internet users are increasingly sharing one culture. (…) Since 2011, we have been following 9 countries to observe media behaviors and attitudes. In 2011, 83 percent were watching broadcast TV more than several times a week, with only 61 percent viewing streamed content on demand. However, this behavior is now changing. Viewers are shifting towards easy-to-use, on-demand services that allow cross-platform access to video content. Regardless of whether you watch your favorite show in the US, China or Spain, the future is streaming.”[2]

The future is streaming: an appropriate image, coherent with the logic of flow the internet has instilled in our lives. The authors of “L’Âge de la multitude” have articulated it this way: “Everything is about flow these days. Newspapers work with an ever-changing flow of readers and people online juggle around with the flow of information. […] In this digital economy, individuals are in perpetual motion, always moving forward at a faster pace as they’re offered simpler, more powerful devices to work with.”

Some forms of media could very well be engulfed in this future stream. So, is Riepl’s Law completely wrong?

Well, consider this: in 2010, former MIT visionary Nicholas Negroponte announced the death of printed books, the first form of mass media, for 2015[3].

But, in 2013, 92 percent of 18-29 year-old read in print in the US, says Deloitte’s TMT Predictions 2015[4]. In 2015, predicts Deloitte, printed books will represent more than 80 percent of all book sales worldwide.

But then again, books are a different kind of media beast, with their more than 500 hundred years of existence. As Jeff Jarvis puts it in his book: “We ain’t seen nothing yet”.

[1] http://en.wikipedia.org/wiki/Riepl percent27s_law

[2] Ericsson ConsumerLab. 10 Hot Consumer trends 2015. Online: http://goo.gl/lnjgE2

[3]Nicholas Negroponte: The Physical Book Is Dead In 5 Years, TechCrunch, August 6, 2010. Online : http://techcrunch.com/2010/08/06/physical-book-dead/

[4] TMT

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Avenir de la télévision: les pièces du puzzle

Mon dernier article sur le blogue Écran de veille du Fonds des médias du Canada a été inspiré en partie par un livre français, Permanence de la télévision, un recueil de textes qui démontrent que la télévision est avant tout l’expression d’un désir humain:

(…) la télévision est fondée sur un désir d’ubiquité, d’omniscience, qui se rencontre déjà dans le mythe de l’anneau de Gygès, rapport par Platon, qui permet à celui qui le porte de devenir invisible pour tous, tout en gardant la faculté de voir et d’entendre ce qui se passe autour de lui. (…) admettons donc que la télévision, dans son origine de « vision à distance », fait partie des désirs intangibles de l’être humain…

Intéressant. Finalement, la technologie n’est qu’un accessoire. La télévision est en train de devenir un mot générique pour désigner ce désir, quels que soient les formes et  les canaux de distribution que son expression emprunte.

Et les formes que prendra la technologie dans l’avenir sont déjà là, il suffit d’assembler le casse-tête.

Interrogé par le journaliste Thibault Henneton de l’excellente émission de France Culture « La Place de la Toile » sur le secret de sa faculté à prédire le futur, Chris Anderson (l’auteur de The Long Tail) se défend d’être un devin en citant l’auteur de science-fiction William Gibson :

Le futur est déjà là – seulement, il n’est pas encore distribué uniformément. » (The Future Has Arrived — It’s Just Not Evenly Distributed Yet.)

MIT_couvertureEn 2001, la MIT Technology consacrait un article de fond à l’avenir de la télévision (ce que la revue fait à peu près tous les dix ans).  La conclusion de l’article procède du même raisonnement que la phrase de Gibson:

Stay tuned. Much of the broadcast, reception and display technology needed to let you see whatever show you want, whenever you want, on whatever screen you want, exists. The pieces just have to be improved and linked together in the right way.

Le mot de la fin, l’une des autres pièces du puzzle, revient au grand gourou, Marshall McLuhan:

La télévision ne sera pas comprise avant d’être dépassée par un nouveau média. Quand survient la désuétude, tout média devient une forme d’art, et c’est à ce moment-là qu’il est possible de s’en servir. Le média cinéma et le média photographie sont mieux compris depuis l’apparition de la télévision. » [Jean PARÉ. Conversations avec McLuhan, 1966-1973. Éditions du Boréal]

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16% des Canadiens délaissent la télévision conventionnelle. Vraiment?

Le 11 juillet dernier la Presse Canadienne nous apprenait que, selon un sondage mené par ComScore pour le compte de Google, 16 % des Canadiens adultes délaissent graduellement la télévision « conventionnelle »  pour favoriser plutôt le visionnement d’émissions en ligne.  Il n’en fallait pas plus pour que cette nouvelle devienne, sur les réseaux sociaux qui s’intéressent à cette question, un autre clou dans le cercueil de la télévision traditionnelle, une autre preuve que le phénomène de « cord-cutting », dont je parlais dans mon dernier billet, est bien réel.

Mais avant d’enterrer définitivement la télévision trad, j’aimerais revenir sur certains raccourcis empruntés par cette dépêche et les réseaux sociaux qui s’en sont emparés.

16% des Canadiens adultes …

En fait, il aurait fallu titrer:  16% des répondants au sondage de ComScore commandité par Google ont déclaré ne jamais consommer d’émissions de télévision devant un téléviseur.

J’ai fouillé et n’ai trouvé que la dépêche de la Presse canadienne. Qui ne précise pas l’échantillonnage, ni le taux de participation, ni le questionnaire  ni la méthodologie employée.

Imaginons qu’il s’agissait d’un sondage web, comme c’est très souvent le cas de nos jours. Cela exclut d’entrée tous ceux qui ne sont pas branchés et ceux qui ne s’y sentent pas vraiment à l’aise (il y en a et pas seulement chez les vieux). Et implique une surreprésentation des internautes enthousiastes.

Comme m’a dit un contact dans le milieu des sondages, si, en plus le sondage a été fait en été, il y a plus de chances que bon nombre d’accros du web – qui, par définition, ne délaissent pas le net pendant les vacances –  y répondent … ceux-là même qui consomment probablement plus de contenu vidéo via le web.

Et peut-être veulent-ils être perçus comme des modernes qui ont rejeté les vieilles technologies depuis longtemps, même s’il leur arrive parfois, par inadvertance, de faire la patate de sofa. Si on considère que, selon le CRTC, 90% des foyers canadiens sont abonnés à un service de télédistribution (câble, satellite, IPTV), il me semble que quelques échantillons de ce 16% doivent avoir accès à un poste de télévision.

… délaissent graduellement

Graduellement, vraiment? C’est basé sur quelles données comparatives? Ce n’est pas mentionné dans l’article de la Presse canadienne.

 la télévision conventionnelle

D’abord entendons-nous: la télévision conventionnelle, dans le vocabulaire du CRTC, c’est la télévision généraliste distribuée par les ondes hertziennes (et numériques depuis 2011). Ce terme exclut les chaînes spécialisées distribuées uniquement par un service de télédistribution. Bon d’accord, je fais ma mémère virgule, on aura compris qu’on veut parler de la bonne vieille télévision qui entre dans nos foyers par les ondes ou la télédistribution, mais cela illustre à mon avis une certaine méconnaissance des médias envers ce secteur. Qui les concerne pourtant au premier chef.

Une industrie qui a su s’adapter

Une chose est sûre pour l’instant, cette désaffection graduelle des Canadiens pour la télévision traditionnelle ne se reflète pas encore dans les revenus de cette industrie:  en 2011, les recettes d’exploitation des entreprises de télévision par câble et par satellite ont progressé de 6,9 % par rapport à 2010 pour totaliser 13,3 milliards de dollars (dollars courants) (source: CRTC, Rapport de surveillance des communications 2012).

Je ne m’inquiéterais pas trop pour les entreprises de câblodistribution, qui ont compris depuis longtemps que leur viabilité ne devait pas reposer sur la télévision par câble uniquement.  Comme je l’écrivais dans un billet de 2011, « les parts de marché combinées de Shaw, Rogers, Bell et Quebecor dans la distribution, la programmation, l’accès Internet fixe et les communications mobiles dépassent largement celles des Américains. Dans ce domaine, nos entreprises canadiennes font mordre la poussière aux géants Comcast/NBCU (nouveaux mariés, par ailleurs), DirecTV, Time Warner Cable et Dish Network (entre autres parce que les américaines ne sont pas dans le mobile) ».  Et j’écrivais ça avant la transaction BCE-Astral…

Mais le streaming est une réalité

Cela dit, la télévision en streaming sur internet est un phénomène qui ne disparaîtra pas et qui est en train de transformer l’industrie.  Les consommateurs l’adoptent de plus en plus rapidement.  Sauf au Québec, où la société distincte se distingue du reste de Canada en termes d’adoption des technologies. J’y reviendrai.

Et peut-être que dans un autre billet je répondrai à une question dont la réponse pourrait être intéressante: quel est l’intérêt de Google de commanditer ce genre de sondage ?

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Télévision et croyance populaire

Dans le milieu de la télévision on surveille un phénomène qui ravit les uns et fait frémir les autres: le cord-cutting, terme inventé par nos amis les Américains –  jamais à court d’images punch – pour désigner les abonnés au services de câble (d’où la « cord ») qui se désabonnent (d’où le « cutting ») parce qu’ils trouvent maintenant tout leur contenu audiovisuel en ligne. Souvent quand on parle du phénomène, on mentionne Netflix et iTunes, bien sûr, mais aussi Hulu et Amazon.

Hulu est un service de diffusion en flux (version OQLF pour streaming) gratuit qui appartient – pour l’instant, des rumeurs de vente circulent – à NBC Universal , Disney (propriétaire du réseau ABC) et News Corporation.

La croyance populaire, qui ne fouille jamais très loin, croit parfois que ce service est disponible ici, ce qui n’est pas le cas: il est « géobloqué », c’est-à-dire que tout ordinateur tentant d’y accéder avec une adresse IP à l’extérieur des États-Unis n’a pas accès aux émissions.

hulu_montage

En apprenant cela, la croyance populaire s’imagine que c’est à cause de la réglementation du CRTC qui leur interdit l’accès au Canada.

C’est faux: le CRTC n’a aucune juridiction sur les services diffusés sur internet (j’explique pourquoi dans cet article). Mais c’est tout de même indirectement la faute au CRTC.

Une nouvelle a retenu mon attention cette semaine: la chaîne américaine CBS, qui n’est pas partenaire de Hulu , a un hit avec une série d’été, « Under the Dome« . Cette série, basée sur une nouvelle de Stephen King, est financée en bonne partie par Amazon qui la diffuse deux semaines après ABC sur son service Amazon Instant Streaming. Qui est géobloqué ici.

Mais pourquoi pas de Hulu ou de Amazon Instant Streaming chez nous, me demanderez-vous lecteurs attentifs, alors que Netflix est disponible au Canada?

Tout cela est une question de droits, une question complexe s’il en est une. Et ce n’est pas parce que les services de streaming américains qui sont associés à un réseau de télévision ne veulent pas débourser pour payer des droits de diffusion au Canada (ce que fait Netflix). C’est plutôt parce qu’ils ont tout avantage à conserver un marché distinct des droits au Canada, marché établi grâce à la protection réglementaire  accordée aux radiodiffuseurs canadiens par le CRTC et qui représenterait une valeur de 1,4 milliard de dollars en paiements d’affiliation ou en achats d’émissions pour les radiodiffuseurs et les producteurs américains, selon l’estimation d’une étude commandée par le CRTC en 2010.

Comme les auteurs de l’étude l’analysent: « La perte d’exclusivité qui se produirait si les Canadiens pouvaient consommer librement le contenu des radiodiffuseurs non canadiens diminuerait probablement de beaucoup la valeur de ce contenu pour les radiodiffuseurs et distributeurs canadiens ainsi que le prix qu’ils seraient prêts à payer pour se le procurer. » Et en conséquence les profits des radiodiffuseurs et producteurs américains.

Contrairement à ces services, Netflix est uniquement dans la business de location de contenu, que ce soit par l’acheminement de DVD par la poste ou en streaming sur le net. Le service doit donc investir de très importantes sommes dans l’acquisition de contenu afin de conserver sa base d’abonnés, qui, par ailleurs, n’est pas encore assez importante pour générer des marges de profit à la hauteur de celles de son service de location de DVD.

Derrière les croyances populaires il y a toujours une situation beaucoup plus complexe qu’on ne pourrait le soupçonner quand on examine la situation superficiellement.

Si vous cherchez à déboulonner quelques croyances populaires dans votre industrie, n’hésitez pas à faire appel à  La Fabrique de sens, l’entreprise qui creuse pour vous!
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Et maintenant, une pause publicitaire

En faisant la recherche pour deux billets portant sur le contenu de marque pour Écran de veille du FMC, j’ai découvert plusieurs vidéos en ligne qui existent grâce à une marque, mais qui ne sont pas manifestement des publicités. Parmi celles-ci quelques trucs intéressants et quelques bijoux:

La série Seinfeld et Superman, pour American Express, est un ancêtre du genre (elle date de  2003). La page d’accueil du site trahit son âge:

superman_seinfeld

On peut trouver des copies de mauvaise qualité sur YouTube, ou aller sur le site officiel en cliquant ici . Je ne peux pas l’imbriquer sur cette page. c’est dire à quel point c’est vieux, pas moyen de partager…

Maintenant, comparons ce contenu de marque de l’ancien temps à cette vidéo d’une chanson, Dumb Ways to Die,  qui fait partie d’une campagne intégrée récipiendaire de cinq prix aux « Cannes Lions » (à prononcer à l’anglaise, étant donné que tout se passe en anglais seulement).  Il s’agit d’une campagne de prévention pour le métro de Melbourne en Australie. Avertissement: la chanson est très accrocheuse et vous restera dans la tête (vous l’avez peut-être déja vue, comme plus de 50 millions de personnes l’ont fait sur YouTube):

Un autre lauréat aux Cannes Lions, le Grand Prix de la catégorie Branded Content: la série de films « The Beauty Inside » dont je parle dans le premier billet sur Écran de veille. On peut visionner une vidéo expliquant cette production ici. Voici le premier épisode:

Maintenant quelque chose de différent:  une campagne B2B  (business to business) pour une compagnie qui vend des logiciels de gestion de la chaîne logistique. Je ne sais pas quel effet aura eu cette série sur les ventes de la compagnie, et elle n’a pas eu beaucoup de hits sur YouTube, mais les films sont très drôles. J’ai visionné les six épisodes avec plaisir. On peut les voir ici.

Pour finir, une autre campagne amusante, celle-ci pour IKEA. Produite depuis 2009, cette série est écrite et produite par Illeana Douglas – une actrice américaine – qui y joue une version « fictionnalisée » d’elle-même. C’est amusant, ça se moque allègrement de l’esprit IKEA et on peut y voir quelques acteurs connus. La série est diffusée sur la chaîne YouTube Easy to Assemble TV.

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Sous-titres et culture distincte

Tel que promis dans mon dernier billet, j’ai épluché le très volumineux, très complet et très documenté rapport « Rapport Lescure » (sur les contenus numériques et la politique culturelle à l’ère du numérique – commande du président de la France).

Je vais en livrer les éléments les plus intéressants pour notre contexte nord-américain par volets thématiques.

Volet d’aujourd’hui: contenu vidéo en ligne et le sous-titrage. En France, on est pressés d’avoir accès aux émissions américaines et le sous-titrage est une solution plus rapide que le doublage. D’abord le fait de « sous-titreurs pirates » qui sous-titrent de façon très organisée, manière crowdsourcing, dans plusieurs langues,  la pratique  est devenue courante chez les diffuseurs légaux français (TF1, M6 et Orange) qui mettent en ligne des versions sous-titrées des émissions américaines dès le lendemain de leur diffusion originale aux USA. Le rapport soutient « ces différentes initiatives et appelle à poursuivre les efforts pour améliorer la disponibilité des séries étrangères en ligne le plus tôt possible après leur diffusion ».

Autre pays, autres moeurs… Ici au Québec le contenu américain, qu’il soit doublé ou sous-titré, n’est pas si ardemment désiré.

En effet, depuis aussi longtemps que les palmarès sur l’écoute des émissions de télévision existent, les Canadiens francophones se distinguent des Canadiens anglophones par leur adhésion sans failles au contenu audiovisuel fabriqué ici, comme en témoigne le palmarès de la semaine dernière. Que des productions d’ici dans les 10 premières émissions. Quelques contenus américains se faufilent ici et là, mais ce sont des exceptions. Il y a également quelques concepts étrangers (Dieu merci!, Le Banquier, etc.), mais ça demeure des émissions profondément québécoises.

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Netflix, ce grand méchant Joueur étranger qui a été abondamment brandi comme un épouvantail pendant l’audience portant sur la transaction Bell/Astral (« Bell et Astral plaident la menace Netflix« ) ne compte que 5% d’abonnés francophones, contre 20% d’anglophones, et la raison principale, selon tous les observateurs, serait la faiblesse du contenu en français sur le service de vidéo sur demande en ligne.

Netflix ambitionne de devenir, à terme, un leader global, tout en reconnaissant que cela prendra du temps. ( « We would be stronger being the leader in a few markets than one of the herd in many markets. Of course, our ambition is to be the leader in many markets, but that will take us some time. » Netflix long term view )

Netflix a les moyens de ses ambitions et peut prendre le temps d’ébranler cette fameuse barrière de la langue qui protège le contenu culturel d’ici. Sa dernière tactique en ce sens? La série « Arrested Development », une nouvelle série mise en ligne le 26 mai et avec laquelle le service espère faire le plein d’abonnés, est offerte avec sous-titres français. Les deux séries originales produites par Netflix,  « House of Cards » et « Hemlock Grove » sont offertes avec sous-titres ou version audio en « français canadien ».

La barrière de la langue ne peut pas à elle seule expliquer notre résistance face à l’invasion étrangère (en tout cas pour le contenu télévisuel, pour la musique c’est une autre histoire).  Après tout, le taux de bilinguisme de la population augmente, les jeunes sont très friands de culture américaine, et autour de moi il me semble qu’on ne parle que de Game of Thrones ou Walking Dead – séries pas disponibles en français ici.

L’attachement pour la production audiovisuelle d’ici relève davantage que de la seule question de la langue. Il est basé sur l’histoire de notre télévision, bâtie sur une culture distincte et surtout développée par une institution, la télévision publique,  qui a eu les moyens d’imposer une certaine idée de la qualité que les autres n’ont eu d’autre choix que d’émuler.

En regardant ce passé, je trouve particulièrement désolant que nos gouvernements n’aient pas encore de plan numérique, ou au minimum une stratégie numérique qui reconnaisse le caractère absolument « disruptif » pour l’identité culturelle de la révolution numérique.

le sens de la vie numérique, nouvelles, télévision

Vissés à nos écrans

Mon dernier billet sur le blogue Écran de veille du Fonds des médias du Canada porte sur la mesure de l’auditoire dans le nouvel univers multiécrans.

En faisant la recherche, j’ai été particulièrement intriguée par un nouveau phénomène : de plus en plus, la consommation de contenus vidéos se fait « seamlessly » (sans obstacles) d’un écran de téléphone intelligent à un écran de tablette, à un écran de téléviseur. Ce qui veut dire qu’on consomme de plus en plus de contenu vidéo. Pour me citer moi-même:

Alors que hier le visionnement de vidéo était une activité réservée aux périodes de loisir, avant ou après la journée de travail, il se fait maintenant par instants « volés » tout au long de la journée. Nos habitudes de consommation ont été transformées par la mobilité et la multiplication des écrans, et elles ne seront plus jamais les mêmes.

Pour surfer sur cette vague d’écoute multiécran, Epson, la compagnie surtout connue pour ses imprimantes, a mis en marché des lunettes avec lesquelles on peut visionner du contenu vidéo en 3-D et qu’on peut se procurer pour 699$.

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Confession d’une Netflix addict

Quand j’écris au sujet du changement de nos habitudes d’écoute, je parle d’expérience. Je m’appelle Danielle Desjardins et je suis une Netflix addict. Voilà, c’est avoué!

Quand je me suis abonnée au service, c’était bien sûr pour y jeter un coup d’oeil d’observatrice pendant le mois gratuit et me débrancher ensuite. J’ai déniché un ou deux films intéressants (dont Ricky de François Ozon, un délicieux petit film méconnu – je ne crois pas qu’il ait été distribué au Québec – qui était en français avec sous-titres anglais*), puis j’ai un peu oublié et je me suis retrouvée abonnée au prix défiant toute compétition de 7,99$ par mois.

J’y suis retournée récemment et ai commencé à y redécouvrir des séries télé américaines que j’avais vues passer sur mon écran fixe, au moment où elles étaient diffusées par un réseau officiel, mais que je n’avais jamais vraiment écoutées, zappant ailleurs lors des pauses publicitaires.

Mais sur Netflix, il n’y a pas de pauses… et on peut voir le prochain épisode tout de suite. Je me rappelle, ça a commencé avec Arrested Development, une sitcom absurde qui avait connu un grand succès critique, mais pas d’auditoire, ce qui lui valu l’annulation après trois saisons en 2006.

Cette série est maintenant citée comme un exemple du nouvel âge platine de la télévision américaine, parce que Netflix a commandé une nouvelle série de 12 épisodes qui seront disponibles en mai prochain.

Mais pour en revenir à mon addiction, à partir de cette série, j’étais accrochée. Il me fallait ma dose de télévision de qualité que je pouvais écouter à mon gré, sans pauses publicitaires, en continu, ce qui facilite beaucoup le suivi des développements, des personnages et des intrigues. J’ai ainsi consommé plusieurs séries comiques : Community, Freaks and Geeks, Raising Hope, Undeclared, Unites States of Tara, Better off Ted; des séries sérieuses: The Walking Dead, Justified, Fringe, etc. Je suis en train de découvrir Dexter, cette surprenante histoire de tueur en série auquel on s’attache.

Et mon addiction est nourrie par les écrans mobiles. Allez, je me confesse: je visionne même sur mon téléphone mobile avec des écouteurs dans mon lit (je n’ai pas de tablette – je songe à commencer une campagne de socio-financement pour m’en procurer une). Je ne lis plus!

J’aime la télévision d’ici, mais mon problème avec tou.tv, ce sont les pauses publicitaires qu’il est impossible de zapper, beaucoup plus intrusives, en cela, que les pauses à la télévision traditionnelle.

Mais surtout, l’offre de découverte de télévision de qualité est beaucoup moins abondante pour une addict comme moi.

Et ça, ça m’inquiète pour l’avenir de la production d’ici. C’est sans doute un sujet que je vais aborder bientôt. À suivre, donc.

* abonnés de Netflix, ne cherchez pas le film de François Ozon, il n’est plus là. Les droits ont sans doute expiré.

économie numérique, contenu, le sens des données, télévision, télévision sociale

Le sens des données: un seul Québécois sur dix, vraiment?

Lu hier dans Infopresse: «La consommation télévisuelle de l’avenir passe par un deuxième écran, et Shazam offre énormément de potentiel pour le développer», souligne Carl Rousseau, directeur général de V numérique. Au pays, 88% des téléspectateurs utilisent un deuxième écran lorsqu’ils regardent la télévision, que ce soit un téléphone intelligent ou une tablette. »

Cela voudrait dire que seulement un Québécois sur dix n’a pas de bébelle électronique entre les mains quand il fait la patate de sofa.

Bon,  je ne suis pas très forte en maths mais, même en posant l’hypothèse que ceux qui possèdent des téléphones intelligents (32% des adultes québécois*) ne possèdent pas de tablette et que ceux qui ont une tablette (13%*), ne possèdent pas de téléphone pas bête, je crois qu’on arrive à un maximum de 55% de Québécois qui ont entre les mains un appareil leur permettant de s’épivarder sur le web en même temps qu’ils visionnent la télévision.

À mon avis, quelqu’un a fait un lapsus (« faux pas de la langue, de la plume » — Le Petit Robert), soit l’auteur de l’article, soit Monsieur Rousseau. Mais un lapsus sans doute révélateur de la surenchère utilisée par certains acteurs de l’écosystème télévision dès qu’il est question du mariage télé-internet et de ses multiples rejetons.

Mise à jour: sur le communiqué annonçant l’entente, on a écrit: « Le téléspectateur consultera ce deuxième écran afin d’avoir accès à du matériel exclusif et satisfaire sa curiosité face à ses émissions favorites. Une habitude déjà en place puisque 88% des auditeurs possédant un téléphone intelligent ou une tablette utilisent déjà ce deuxième écran lorsqu’il écoute (sic) la télévision. »

J’avais pourtant vérifié le communiqué, mais je crois qu’un peu de mauvaise foi de ma part – j’adore prendre les gens en défaut, c’est une manie – a fait disparaître la citation 🙂

*selon le CEFRIO

CEFRIO